Derrière les maladies que nous attrapons, se cachent toujours les mêmes coupables : les microbes.
Mais tous ne sont pas systématiquement dangereux.
Alors, qu’est-ce qu’un microbe ? Que signifie donc ce terme ?
Quelle différence y a-t-il entre une bactérie et un virus ?
Les microbes
Le terme microbe signifie «petite vie». Il a été inventé par le chirurgien français Charles-Emmanuel Sédillot en 1878 pour désigner tous les êtres vivants qui ne se voient qu’au microscope et qui provoquent des maladies.
On sait maintenant que ce terme commode n’est pas très scientifique. Il mélange en effet des micro-organismes très différents : bactéries, virus, protozoaires, algues unicellulaires, champignons… Les premières bactéries observées avaient des formes de bâton (bakteria en grec).
Le terme microbe est employé pour désigner tous les organismes vivants et microscopiques (micro-organisme). Ce sont les virus, les bactéries, certaines espèces de champignons, les algues protozoaires ainsi que plusieurs autres organismes infectieux ou non.
Les bactéries
Les bactéries sont des êtres vivants microscopiques, donc des microbes, constitués d’une unique cellule entourée d’une paroi et dépourvue de noyau (elles font partie des organismes procaryotes). Elles mesurent autour de 1 µm (une bactérie est donc cinquante fois plus fine qu’un cheveu) et sont le plus souvent en forme de bille ou de bâtonnet.
Les bactéries sont les premières formes de vie apparues sur Terre et elles colonisent encore la totalité des milieux terrestres.
Beaucoup d’entre elles ne sont pas nocives, certaines s’avèrent même bénéfiques pour l’Homme (elles nous aident à digérer, par exemple), mais d’autres sont à l’origine de maladies graves comme la peste, le choléra, la tuberculose ou, moins terrible, l’angine.
Un trop grand nombre de bactéries pathogènes (du grec patho = maladie et gène = produire) peut déstabiliser le système immunitaire et déclencher différents symptômes comme de la nausée, de la diarrhée, le vomissement, etc. Le pneumocoque et le staphylocoque sont des bactéries bien connues et responsables de plusieurs infections chez l’humain. Certaines bactéries sont aussi responsables de la tuberculose, du choléra, de la peste, de l’angine bactérienne, etc.
Les antibiotiques empêchent la multiplication des bactéries.
Les virus
Le virus («poison» en latin) est un microbe infectieux composé d’éléments génétiques parasitaires (il est 20 fois plus petit qu’une bactérie). Il est formé d’une capsule arrondie composée de protéines. Cette capsule nommée capside (structure qui entoure le génome) renferme quelques parties de son matériel génétique.
Pour se multiplier il a besoin d’une autre cellule vivante. Une fois à l’intérieur d’un organisme vivant, il repère une cellule et s’y introduit pour ensuite reproduire plusieurs copies de son matériel génétique (capsides). Le grand nombre de capsides reproduit fera éclater la cellule. Le virus s’empare ainsi des autres cellules saines de son hôte.
Le système immunitaire de la personne infectée réagira pour combattre et expulser le virus, elle ressentira alors de la fatigue, des maux de tête et de la fièvre.
Il peut également vivre quelques heures ou quelques jours sur certaines surfaces. Les virus sont responsables de plusieurs maladies comme l’influenza, le sida, la variole, la poliomyélite ou la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19). Aucun antibiotique ne peut guérir les maladies provoquées par les virus, d’où l’importance de se faire vacciner lorsque cela est possible.
Les antibiotiques n’ont aucun effet contre les virus.
Les bonnes bactéries
Ces bactéries qui nous veulent du bien.
Bactéries, levures, virus, champignons, archées… autant de micro-organismes vivants avec lesquels nous cohabitons et qui composent notre “microbiote” (ou flore microbienne).
On recense 4 sortes de flores spécifiques : digestive, cutanée, vaginale et respiratoire (oropharyngée).
Parmi ces différents organismes, les bactéries représentent les espèces les plus nombreuses. Dans l’intestin, par exemple, 90 % du microbiote est composé de bactéries.
Un grand nombre de bactéries vont former comme une barrière de protection contre l’invasion d’agents pathogènes. D’autres rempliront des fonctions biologiques (au niveau du métabolisme, sur la synthèse des vitamines, la dégradation des aliments…).
Chaque microbiote (cutané, intestinal, vaginal, oropharyngé) regroupe des micro-organismes bien spécifiques selon les caractéristiques du milieu dans lequel elles évoluent (présence ou non d’oxygène, acidité…).
Même si la plupart des grandes familles de bactéries sont présentes chez tout le monde, chacun d’entre nous présente un microbiote singulier, presque aussi spécifique que ses empreintes digitales. Cet écosystème se met en place progressivement pendant toute la grossesse.
Les différents microbiotes
Observons dans le détail la composition de chaque microbiote.
Le microbiote intestinal
La flore digestive est variable selon les endroits du tube digestif. On trouve par exemple très peu de bactéries dans l’estomac en raison de l’acidité qui caractérise ce milieu. En revanche, dans le l’intestin grêle et le côlon ou gros intestin, la flore est beaucoup plus abondante.
Le microbiote intestinal comprend 100.000 milliards de bactéries de différentes sortes. On dénombre entre 800 et 1000 espèces différentes. Parmi les grandes familles les plus connues, citons les Firmicutes et les Bacteroidetes.
Notre hygiène de vie et notre alimentation jouent un rôle dans l’équilibre et la présence de certaines bactéries par rapport à d’autres. “Les personnes végétariennes ont un microbiote plus riche en Prevotella qui font partie des Bacteroidetes, par exemple”, explique le Dr Anne-Marie Cassard.
Plus les espèces de bactéries sont nombreuses et variées, mieux c’est pour notre microbiote et notre santé.
Les bactéries occupent différentes fonctions : Certaines d’entre elles vont synthétiser les vitamines (comme la vitamine K) ou les oligo-éléments, certaines vont intervenir dans la production d’anticorps, d’autres produiront des hormones impliquées dans le dialogue intestin-cerveau, d’autres joueront un rôle dans la dégradation des aliments, etc.
Lorsque la flore intestinale est équilibrée, tout va bien et notre système immunitaire fonctionne correctement. Rappelons en effet que 85 % de nos cellules immunitaires se logent dans l’intestin.
En cas de déséquilibre, divers problèmes sont susceptibles d’apparaître, comme des problèmes intestinaux allant de simples ballonnements au syndrome du côlon irritable. Mais les équipes de recherche qui étudient le fonctionnement du microbiote intestinal vont plus loin et estiment qu’un déséquilibre de la flore intestinale peut être à l’origine de maladies plus graves, comme le diabète, l’asthme, les allergies ou les maladies auto-immunes (maladie de Crohn, lupus, sclérose en plaques…), voire jouer un rôle important dans l’obésité et certains troubles psychiques (autisme, dépression, TOCs…)
Un changement d’alimentation, le stress, la prise d’antibiotiques peuvent suffire à créer un déséquilibre de cet écosystème sensible. Pour prendre soin de votre microbiote, veillez à adopter une alimentation suffisamment variée et riche en fibres (fruits et légumes). Une cure de probiotiques (compléments alimentaires) peut également être bénéfique. “Toutefois, le rôle bénéfique des probiotiques doit encore être vérifié par des études bien conduites”, ajoute le Pr Karine Clément, médecin et professeur de nutrition.
Le microbiote vaginal
La flore vaginale est liée aux hormones et se met en place à la puberté. Selon les périodes de la vie, la flore présente dans ce milieu peut subir des déséquilibres. C’est le cas lors de changements hormonaux importants (puberté, grossesse, ménopause). Savez-vous que nos odeurs intimes proviennent notamment des espèces de microbes que nous hébergeons ?
Le microbiote vaginal contient environ 90 % de lactobacilles de différentes sortes (Lactobacillus crispatus, Lactobacillus gasseri…). Dénommés bacilles ou flore de Döderlein, ces bactéries ont besoin des œstrogènes pour survivre et se développer. C’est la raison pour laquelle cet écosystème subit des perturbations hormonales (lors du cycle menstruel, lors d’une grossesse et à la ménopause). En sécrétant de l’acide lactique, ces lactobacilles permettent de garantir un pH bas (acide), limitant ainsi la prolifération de mauvaises bactéries et le risque d’infections.
“Outre ces bactéries, la flore vaginale est riche en Candida Albicans, un champignon qui trouve notamment refuge dans la muqueuse vaginale”, ajoute le Dr Anne-Marie Cassard.
En état d’équilibre, cette flore vaginale a donc une action anti-mycosique et antibiotique.
Lorsqu’elle est en déséquilibre (en cas de diminution des bonnes bactéries et/ou de prolifération des mauvaises bactéries), les désagréments sont susceptibles d’apparaître : infection urinaire ou vaginale, mycose…
Plusieurs facteurs peuvent perturber l’équilibre de la flore vaginale : Le port de vêtements trop serrés, un excès d’hygiène ou l’usage de produits inadaptés, la prise de médicaments, le stress, une maladie (diabète, problème thyroïdien…), le tabagisme, certains moyens contraceptifs (faiblement dosés en œstrogènes).
Pour maintenir l’équilibre de la flore vaginale, utilisez des produits d’hygiène adaptés. Votre médecin pourra aussi vous prescrire des probiotiques sous la forme d’ovules vaginaux pour prévenir les infections si vous avez tendance à en faire régulièrement.
Le microbiote cutané
La flore cutanée, présente sur toute la surface de la peau, est, elle aussi, composée de multiples espèces de micro-organismes.
Ce microbiote se nourrit de sébum et de kératinocytes morts (cellules présentes sur l’épiderme). Là, encore, la flore cutanée joue un rôle protecteur contre les germes et autres agents infectieux.
En raison de la population qu’elles hébergent, certaines personnes attireront davantage les moustiques que d’autres, par exemple. La flore cutanée est composée principalement de Firmicutes, de Protéobactéries, et d’Actinobactéries. Certaines parties du corps, notamment les zones humides (aisselles, pieds..) abritent de plus grandes quantités de bactéries.
Responsable de l’acné, la Propionibacterium acnes est particulièrement présente chez les adolescents, tandis que le cuir chevelu abrite essentiellement des levures. Cet écosystème se modifie selon l’âge et le climat. Ainsi, en vieillissant, la flore cutanée s’amenuise.
Pour protéger au mieux la flore cutanée, il est recommandé d’opter pour une hygiène rigoureuse mais pas excessive. Idéalement, choisissez des produits de toilette ayant un pH neutre dénué le plus possible d’agents chimiques (colorants, conservateurs, parabènes…).
Le microbiote oro-pharyngé
Dans le nez, dans la gorge et les poumons, les espèces bactériennes sont également nombreuses et variées. On y trouve des staphylocoques dorés, des streptocoques, des bactéries de type Neisseria, des Lactobacilles… Ces bactéries sont là pour «occuper le terrain» et éviter ainsi que d’autres microbes ou virus prennent la place et viennent perturber le système immunitaire en provoquant une infection. C’est grâce au séquençage de l’ADN que les chercheurs ont pu identifier précisément la composition de la flore pulmonaire en 2010.
Les recherches n’ont donc pas encore fini de nous révéler tous les mystères de nos différents microbiotes.
Notre système immunitaire
Le système immunitaire est un système de surveillance et de défense qui fonctionne en permanence pour protéger notre organisme des agressions extérieures. Il est constitué de plusieurs organes et de dizaines de types différents de cellules.
Comment agit-il ?
1. Un microbe pénètre dans l’organisme par le nez, les yeux ou la bouche, dans le cas par exemple de la Covid-19 ; par le sang, le sperme ou les sécrétions vaginales s’agissant du virus de l’hépatite B.
2. Des globules blancs le détectent et le captent. Ces cellules (leucocytes) sont présentes dans le sang, la lymphe ou les organes (derme, poumons, intestins…).
3. Des cellules immunitaires sécrètent des substances chimiques (cytoklines) qui en recrutent d’autres, capables d’éliminer le microbe en l’absorbant et en le digérant. C’est l’étape de l’inflammation aiguë responsable des symptômes : rougeur, fièvre…
4. En parallèle, d’autres cellules migrent via le sang jusqu’aux ganglions lymphatiques les plus proches. Là, elles présentent un fragment de microbe, l’antigène, à une autre catégorie de globules blancs, les lymphocytes T et B qui s’activent et se multiplient. Les lymphocytes B produisent des anticorps qui peuvent neutraliser le microbe, les lymphocytes T détruisent les cellules infectées.
Après guérison, les lymphocytes T et B, situés dans les ganglions, peuvent garder l’antigène du microbe en mémoire. Dans ce cas, on ne peut pas être malade une seconde fois. C’est la mémoire immunitaire, qui est la base de la vaccination.
Les principaux organes du système immunitaire
- Les ganglions lymphatiques : situés au niveau du cou, des aisselles, de l’intestin, des plis de l’aine, des genoux, ils stockent des lymphocytes. Le corps en compte environ 100 !
- Le thymus : les lymphocytes T y terminent leur maturation. Ceux qui sont compétents (5 %) seront libérés dans le sang.
- La rate : c’est un réservoir de globules blancs.
- Les muqueuses : nez, bronches, intestin, voies urinaires et génitales. 20 % des globules blancs résident dans le seul intestin.
- La moelle osseuse : y sont fabriqués tous les globules blancs. Les lymphocytes B s’y développent jusqu’à leur maturation.
Comment se forme notre système immunitaire ?
– Pendant la grossesse, les anticorps de la mère sont transmis au foetus via le placenta.
– À la naissance, l’exposition à de nombreux microbes forge le système immunitaire du nouveau-né.
Lors de l’accouchement, il entre en contact avec les bactéries vaginales maternelles qui vont peupler son intestin et amorcer le développement de son microbiote, qui joue un rôle clé dans la formation du système immunitaire.
– S’il nait par césarienne, il s’imprégnera plutôt de sa flore cutanée.
– Le lait maternel apporte des anticorps et contient des bactéries qui enrichissent le microbiote du bébé.
– Les vaccinations stimulent le système immunitaire en cours de maturation.
– La diversification alimentaire enrichit le microbiote intestinal et une forte réaction immunitaire se produit.
– Au fur et à mesure de sa croissance, lorsqu’il va entrer en contact avec d’autres enfants à la crèche, par exemple, son organisme va découvrir d’autres types de bactéries et son microbiote s’enrichira de la variété de ces espèces.
– 1 million : c’est le nombre d’éléments étrangers au corps (bactéries, virus, parasites, substances chimiques…) auquel notre système immunitaire peut répondre en même temps.
– 100 millions : c’est le nombre minimum d’anticorps présents dans le corps.
– 15 milliards : c’est le nombre de globules blancs que fabrique chaque jour la moelle osseuse.
Produit-on toujours des anticorps en cas d’infection ?
Sauf situation de déficience immunitaire, la réponse est oui : “À chaque fois que l’organisme rencontre un élément qui lui est étranger, il fabrique des anticorps”, rappelle le Pr d’immunologie, Éric Vivier.
Et ceci, que l’on présente des symptômes ou non.
Quelle que soit la maladie, cette quantité dépend de la quantité de virus qui nous infecte, de notre capacité individuelle à les produire et de la nature de l’agent microbien lui-même.
Nous protègent-ils forcément contre la maladie ?
Pas toujours. “Dans le cas du sida par exemple, on produit des anticorps mais ceux-ci ne parviennent généralement pas à empêcher le virus de pénétrer dans les cellules et de se propager”, signale le Pr Vivier. Pour la maladie de Lyme, les anticorps assurent une protection imparfaite et limitée dans le temps, raison pour laquelle on peut l’attraper de nouveau.
Concernant la Covid-19, il y a encore beaucoup d’incertitudes. “Cela dit, des études montrent que les personnes infectées fabriquent des anticorps neutralisants, c’est-à-dire protecteurs, même lorsqu’elles ont développé des symptômes mineurs.” Quant au virus de la grippe, sa capacité à muter explique pourquoi les anticorps produits une année ne sont plus efficaces la suivante.
Infection ou vaccination : la réaction immunitaire est-elle la même ?
“Dans les deux cas, les mécanismes sont les mêmes puisque le système immunitaire, réagit à chaque fois en fabriquant des anticorps spécifiques contre le microbe”, précise le Pr d’immunologie, Renato Monteiro.
La grande différence est que, pour le vaccin, on inocule un fragment de microbe (mort) ou un microbe vivant mais dont la virulence a été affaiblie.
Combien de temps est-on protégé par les anticorps ?
La “mémoire immunitaire” varie d’un microbe à l’autre, et même d’une personne à l’autre. La durée de la protection acquise varie aussi selon les vaccins en fonction de la quantité d’antigènes qu’ils contiennent et de leur mode de préparation. Ainsi, les vaccins vivants atténués induisent une production d’anticorps plus persistante dans le temps que les vaccins inactivés.
Pourquoi certains microbes persistent dans l’organisme en dépit du système immunitaire ?
“Parce qu’ils peuvent se cacher dans certaines cellules, et rester invisibles du système immunitaire pendant des mois ou des années”, indique le Pr Vivier.
Par exemple, le virus de l’herpès qui peut, à la faveur d’une baisse des défenses immunitaires liée par exemple à une dette de sommeil chronique, d’un stress… quitter les ganglions nerveux où il “dormait” et rejoindre les lèvres pour y infecter les cellules locales.
Autre exemple, la varicelle : “Une fois contracté, le virus persiste toute la vie dans certains ganglions, et peut se réactiver si nos défenses immunitaires sont affaiblies, mais cette fois sous forme de zona”, dit la Pr Astrid Vabret.
Quant à la Covid-19 en montagnes russes, les chercheurs ne savent toujours pas l’expliquer. Et vient s’ajouter à cette énigme les variants…
Qu’est-ce qui affaiblit notre système immunitaire ?
Notre système immunitaire est certes solide, mais n’est pas non plus un superhéros !
Comme toutes les fonctions de l’organisme, il peut être fragilisé ou altéré dans certaines situations.
Quelles en sont les causes ?
Dans la majorité des cas, notre système se dérègle à cause d’une susceptibilité génétique. Parfois, des facteurs hormonaux entrent en compte.
Un excès d’hygiène pendant l’enfance et le recours trop fréquent aux antibiotiques pourraient aussi altérer le fonctionnement du système immunitaire, et de là favoriser ces maladies auto-immunes. (Les maladies auto–immunes résultent d’un dysfonctionnement du système immunitaire conduisant ce dernier à s’attaquer aux constituants normaux de l’organisme).
Enfin, certaines maladies pourraient être initiées lors d’une infection à un microbe dont un composant est similaire avec celui d’une cellule de l’organisme.
“Par réaction croisée, les anticorps produits contre le microbe vont ensuite se retourner contre les cellules qui présentent une ressemblance et, de là, créer une inflammation chronique néfaste”, explique le Pr Renato Monteiro, directeur du Centre de recherche sur l’inflammation.
Quels sont les facteurs qui affaiblissent notre système immunitaire ?
– Le surpoids et l’obésité : Le tissu adipeux secrète des cytokines spécifiques, appelées adipokines, dont certaines sont proinflammatoires et d’autres anti-inflammatoires. “Or, en cas d’excès de poids, les premières vont prendre le dessus sur les secondes, entraînant des micro-inflammations qui peuvent, en devenant chroniques, altérer l’immunité”, explique la Pr Martine Duclos.
– Un diabète déséquilibré : “Lorsqu’elle n’est pas traitée et contrôlée, l’hyperglycémie diminue les réactions immunitaires et, de là, expose à une plus grande sensibilité aux infections, notamment la grippe, les infections urinaires ou fongiques ou les surinfections pulmonaires à l’occasion d’une bronchite”, indique le Dr Boris Hansel, endocrinologue.
Et pour la Covid-19 ? “Il n’a pas été démontré que les diabétiques avaient plus de risques que les autres d’être contaminés par le virus, mais quand ils le sont, ils sont plus à risque de développer des formes sévères”.
– L’hypertension : “L’hypertension peut provoquer un emballement de certains globules blancs impliqués dans l’inflammation”, explique la Pr Claire Mounier-Vehier, cheffe du service de médecine vasculaire et hypertension artérielle du CHU de Lille. “D’où l’importance que la tension soit bien contrôlée et, si on est sous traitement, de continuer à le prendre car, contrairement à ce qui a été suggéré au début de la crise de la Covid-19, les médicaments antihypertenseurs n’affaiblissent en aucun cas l’immunité”.
– La consommation excessive de sel : Une étude publiée en avril 2020 dans la revue Science Translational Medicine indique que la consommation excessive de sel pourrait affaiblir notre immunité. Cette mauvaise habitude était déjà liée à une augmentation de l’hypertension artérielle.
Les sujets étudiés ayant consommé six grammes supplémentaires de sel par jour (la teneur en sel de deux repas de restauration rapide) ont montré des déficits immunitaires prononcés.
De fait, la consommation de fast food sur le long-terme impacterait également notre système immunitaire. Les chercheurs insistent donc sur l’importance de suivre les recommandations de l’OMS : 9 à 12 grammes par jour en moyenne.
– Le stress : Par expérience, certains constatent qu’en période de stress, ils sont plus sensibles aux infections et que celles-ci durent plus longtemps. En mars dernier, des chercheurs de l’Inserm au Centre d’immunologie de Marseille-Luminy ont publié une étude chez la souris qui donne une piste d’explication. “Nous avons observé que les hormones du stress stimulaient les récepteurs qui se trouvent à la surface de certaines cellules immunitaires, empêchant celles-ci de produire des substances chimiques inflammatoires nécessaires à l’élimination des virus”, explique Sophie Ugolini, coordinatrice de l’étude.
– Le manque de sommeil : De nombreuses études ont montré qu’un déficit chronique de sommeil (moins de 6 h par nuit) nous rendait plus vulnérables aux infections. En effet, en écourtant nos nuits, nous écourtons en même temps le temps de sommeil lent profond. Or, celui-ci favorise la fabrication des lymphocytes B “mémoire” qui enregistrent les caractéristiques des microbes et produiront des anticorps spécifiques en cas de nouvelle agression.
– Certains médicaments : Certaines chimiothérapies et les médicaments immunosuppresseurs affaiblissent le système immunitaire, de même que la cortisone prise sur le long terme. “Cela dit, c’est justement parce qu’ils bloquent ou freinent l’activité des cellules immunitaires, pour soigner par exemple certains cancers ou de maladies autoimmunes, qu’ils sont prescrits”, insiste le Pr Vivier.
– L’âge : Vers la soixantaine, les compétences de certaines de nos cellules immunitaires commencent à s’altérer : “Cela a été surtout démontré pour les lymphocytes T, qui réagissent moins bien aux agressions”, précise le Pr Vivier. L’organisme se défend ainsi moins bien en cas de rencontre avec un nouveau microbe comme celui de la Covid-19.
Comment booster naturellement ses défenses immunitaires ?
Une fois de plus, comme je le répète souvent dans mes articles, renforcer ses défenses immunitaires, c’est agir sur son hygiène de vie (changer son alimentation, préserver son sommeil, pratiquer une activité physique…). On peut aussi avoir recours à certains produits naturels, vitamines, oligoéléments, huiles essentielles…
Comme nous l’avons vu plus haut l’immunité fait référence à la capacité du corps à se défendre contre des substances menaçantes pour son bon fonctionnement ou sa survie.
L’immunité est une machine complexe. Elle implique plusieurs types de globules blancs, qui interagissent entre eux et sont en mesure de réagir très vite en cas d’agression extérieure.
Il a en effet été démontré que le cadre et l’hygiène de vie influencent la qualité de la réponse immunitaire.
La singularité de l’hiver :
Dans ce contexte, les saisons froides qui coïncident avec une plus forte circulation des virus sont généralement mal accueillies par l’organisme. «Sur le plan alimentaire, la nécessité inconsciente de constituer des réserves par une alimentation plus grasse peut engendrer une inflammation intestinale», détaille le Dr Teulières, médecin généraliste et immunologiste.
Si l’immunité est en berne à l’approche de l’hiver, ce n’est donc pas sans raison.
Chez certaines personnes, la production de sérotonine diminue entre l’automne et l’hiver, et occasionne la survenue d’un syndrome dépressif, de la fatigue et du stress. Or, cette hormone est sécrétée non seulement par les neurones, mais également par les cellules du système immunitaire, et plus de 95 % de la sérotonine n’est d’ailleurs pas produite par le cerveau mais par l’intestin. Il n’est pas rare d’avoir des envies de sucre, particulièrement en fin de journée et en soirée, quand les jours se font plus courts et que la luminosité réduit. C’est tout à fait normal : l’organisme cherche à compenser la baisse de sérotonine du cerveau. Alors booster sa production de sérotonine, c’est lutter contre le stress, et donc doper ses défenses immunitaires !
Commencer par améliorer son hygiène de vie :
«L’entrée en période d’hiver représente pour l’organisme un effort d’adaptation considérable», analyse le Dr Teulières.
Le conseil du Dr Teulières : ne pas changer brutalement son alimentation, privilégier des produits de saison, et ne pas enrichir son alimentation de sucre ou de gras sous prétexte qu’une dépression hivernale se fait sentir. Et dans l’idéal : il faut vraiment lever le pied sur les boissons alcoolisées et sur les sodas sucrés, qui peuvent déréguler le système immunitaire.
Pour booster la production de sérotonine, et donc le fonctionnement des cellules : immunitaires neuronales et intestinales, veillez à privilégier les glucides à digestion lente provenant notamment du pain, des pâtes, des céréales, du riz plutôt que de consommer des glucides à digestion rapide provenant des bonbons, des biscuits, des pâtisseries.
Dormez 7 à 8 heures par nuit, et durant le jour, laissez pénétrer le maximum de lumière solaire à l’intérieur de votre maison, ou de votre lieu de travail si vous le pouvez. Une astuce piquée chez nos voisins scandinaves : placez quelques miroirs à des endroits stratégiques pour renvoyer la lumière du jour vers l’intérieur du lieu où vous vous trouvez.
La pratique régulière d’une activité physique, comme simplement la marche à raison de 30 minutes par jour, en améliorant la circulation sanguine, concourt à l’augmentation des cellules de l’immunité et réduirait le risque d’infection respiratoire de 40 %. À l’inverse, le surentraînement aurait un impact plutôt négatif : après une séance de sport trop intense, on observe une baisse du taux de lymphocytes, ce qui implique moins d’anticorps potentiels en cas d’agression.
À vous de trouver le juste équilibre, sans forcer.
Les vitamines, alliées de l’immunité
La vitamine A : Elle stimule la prolifération des globules blancs, et la production d’anticorps par les lymphocytes. Elle est aussi essentielle à la fonction barrière de la muqueuse intestinale. La bonne dose : 600 à 800 microgrammes par jour. Pour un apport, pensez aux carottes, au potiron ou encore aux épinards. Attention, pour les femmes enceintes, des compléments contenant de la vitamine A (rétinol) et notamment l’huile de foie de poisson, peuvent être nocifs et provoquer des malformations à la naissance en cas de dépassement important de la dose recommandée.
La vitamine C : C’est un puissant antioxydant qui protège les globules blancs et augmente leur mobilité. Elle stimule la production de cytokines, les messagers qui activent la réponse immunitaire. On la trouve dans les fruits et les légumes. La dose journalière recommandée est de 110 mg par jour.
La vitamine E : désigne un groupe de molécules appelées les alpha-tocophérols. Ceux-ci sont naturellement présents dans l’alimentation, comme dans les graines de tournesol ou des huiles végétales. Des études ont montré que la vitamine E compense la perte de réponse immunitaire due au vieillissement en stimulant la production de globules blancs et son intérêt dans la lutte contre les infections respiratoires.
La vitamine D : est connue pour activer les globules blancs (lymphocytes T) nécessaires pour fabriquer des anticorps et détruire les microbes. Elle se trouve surtout dans les poissons gras (le foie de morue et son huile, les harengs fumés, les maquereaux…). Deux formes sont les plus courantes, la D2, d’origine végétale, et la D3, d’origine animale. Aucune différence d’efficacité entre les deux, mais un apport minimum conseillé de 5 microgrammes par jour potentialisé par une exposition quotidienne à la lumière du jour, la production de vitamine D étant surtout induite par les rayons UV.
Le sélénium et le zinc, deux oligoéléments essentiels :
– Le sélénium, retrouvé dans l’emmental, le jambon cuit ou les champignons de Paris. À raison de 50 microgrammes par jour, il intervient au niveau immunitaire en maintenant en alerte un pool de globules blancs.
– Le zinc, (fruits de mer, volaille fromage…) à raison de 10 à 15 mg par jour, protège les membranes cellulaires des infections par les agents microbiens.Tous ces actifs, en cure trimestrielle, remettront à niveau vos stocks annuels pour un hiver en toute sérénité.